Depuis dimanche dernier, un site web est mis à disposition des citoyens hongrois, qui sont ainsi invités à soumettre leurs commentaires sur le contenu de la nouvelle Constitution de la Hongrie, dont la validation est prévue au début du printemps 2011. Les quelques ONG hongroises qui traitent du respect des libertés en Hongrie telles que TASZ , soulignent avec l’appui de juristes constitutionnalistes que rien dans la Constitution actuelle ne permet de souhaiter une réforme constitutionnelle. Ainsi, le souhait ardent du nouveau gouvernement d’en changer soulève, sinon des suspicions claires, de lourdes inquiétudes. Sur le site web en question, tout citoyen hongrois peut présenter des observations sur la future Constitution. C’est bien, mais pourquoi cette réforme ? Officiellement, selon Jozsef Szajer, «le Parlement vise à adopter une Constitution définitive qui mettra fin à la nature transitoire du texte actuel, même symboliquement« . Il a également ajouté que cette nouvelle Constitution devra être fondée sur l’histoire hongroise vieille de mille ans, ainsi que sur les principes modernes de constitutions européennes. Jozsef Szajer, à la tête de la commission des affaires sociales, a été désigné par le Premier ministre Orbán pour superviser ce qui sera publié sur le site. Les législatives d’avril dernier ont donné la majorité des deux tiers du Parlement au parti conservateur FIDESz. Désormais, les détracteurs d’une telle prise de pouvoir en Hongrie n’hésitent plus à dénommer le pays « l’Orbanie », tant Viktor Orbán et ses accolytes y sont omnipotents. Ainsi, personne n’est dupe, ce nouveau site web n’existe qu’à titre consultatif. Les ONG boycottent « par principe » L’organisation TASZ (Union pour les Libertés Civiles), avec des experts constitutionnalistes en son sein, a reçu une invitation officielle début septembre de la part de László Salamon, président de la Commission parlementaire, pour s’exprimer sur la réforme de la Constitution… avant fin septembre ! Autant dire que l’invitation était purement formelle. Outre l’aspect formel un tantinet cynique pour les intellectuels de cette organisation, l’empressement du gouvernement à vouloir réformer la Constitution s’avère dangereux. L’échéance de cette réforme a été étrangement rapprochée dans le temps – et non reportée comme la logique le voudrait – trois fois : de 2012 à juin 2011, puis au début du printemps 2011. Pour TASZ, le processus de législature est indigne à l’égard d’une entreprise aussi importante. En réalité, les décisions sur les changements que subira la Constitution semblent plutôt avoir déjà été prises depuis belle lurette. Dans un communiqué de refus à participer à un processus qu’elle juge « non ouvert » et « non transparent », TASZ rappelle qu’il y a déjà eu une tentative de réforme de la Constitution en Hongrie entre 1994 et 1998. Elle avait échoué car son adoption n’avait pas atteint la majorité des 4/5 au Parlement. Mais elle prévoyait au moins des règles formelles qui obligeaient le parti au pouvoir à obtenir le consentement d’une partie de l’opposition. A l’inverse, la conjoncture politique aidant, le processus de législature actuel ne propose pas réellement, ni à l’opposition, ni aux citoyens, de participer à son élaboration, mais semble plutôt essayer de trouver une légitimité démocratique dans ce qui tient purement de la volonté du pouvoir exécutif. Une organisation telle que TASZ n’aurait su faire plaisir au gouvernement en participant à cette mascarade démocratique. Un symbolisme à la fois inutile et dérangeant Le manque de symbolisme dans la Constitution de 1989 est aujourd’hui avancé comme l’un de ses échecs par le parti au pouvoir. Certaines formes d’attachement symbolique aux origines chrétiennes et au passé glorieux (la Sainte-Couronne, ici à droite) de la Hongrie ont déja été largement évoquées par le premier ministre et par le président Schmitt. Au deuxième millénaire, de tels symboles ont-ils une incidence sur le bien-fondé d’un tel document juridique ? A ce propos, TASZ rappelle à juste titre que l’écrasante majorité des pays européens se sont abstenus de faire référence à Dieu ou à leur passé glorieux dans leurs Constitutions. Enfin, la référence à la religion pose un véritable problème de représentation dans une société pluraliste et supposée tolérante. Eriger la domination d’une religion dans la Constitution ne saurait satisfaire tous les administrés. Selon TASZ, la Constitution doit servir les Hongrois pour des raisons et des principes que tout le monde peut accepter volontairement. Or, le texte que la FIDESz est en train de concocter semble bien être celui de la division de la société hongroise, en partie et d’abord sur une base religieuse. Articles liés : M. Gyurcsany appelle à un référendum contre la future Constitution Pal Schmitt, nouveau président « sur-mesure » Réforme des médias, acte II Médias : retours (non négociés) aux choses sérieuses Education : c’est reparti comme en 40? La laïcité remise en question dans les écoles hongroises Orban, façon « Sarkozie » Biographie : la revanche de Viktor « L’unité, l’ordre et la sécurité » : « V » comme Viktor Les pleins pouvoirs pour Orbán?
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