Portrait d’électeur : « La gauche a échoué sur tous les plans »

électionsA quelques jours des élections, Hu-lala est allé à la rencontre de ceux qui vont voter pour comprendre les raisons de leurs choix politiques. Tamás M., jeune Hongrois de Transylvanie, participera pour la première fois à une élection en Hongrie le 6 avril prochain. Le garçon, qui se décrit lui-même comme « conservateur » et « issu d’un milieu populaire », sait déjà qu’il votera pour le Fidesz. Il nous confie ses convictions et ses doutes sur la politique du pays.

C’est dans un café du centre ville que nous retrouvons Tamás M., 25 ans. Sicule, né en Transylvanie, il étudie depuis 2 ans à Budapest. Naturalisé hongrois en 2013, il participe cette année pour la première fois à une élection nationale. Pour lui, le parti de droite Fidesz est un choix évident, mais les raisons de ce choix sont complexes.

« En 2006, la gauche a échoué sur tous les plans : politiquement, économiquement, mais aussi et surtout moralement. La majorité de gauche n’a fait preuve d’aucune humanité pendant les agitations de 2006. L’usage de la force a été démesuré, la gauche a perdu toute sa crédibilité. »

Mais le vote Fidesz n’est pas seulement un vote contre la gauche pour Tamás. Quand on l’interroge sur son soutien à la droite, c’est avant tout le Hongrois de l’étranger qui parle :

« Le Fidesz a proposé dès 2005 une loi populaire qui offrait à tous les Hongrois de l’étranger la nationalité hongroise. Dès que le parti a obtenu le pouvoir, il s’est empressé de faire voter cette loi. Ce n’était pas un référendum, c’était une loi, car cette question devait être une évidence, pas une chose qui devait être soumise au jugement d’autrui. A l’opposé, le Mszp, et Gyurcsány en tête, ont fait campagne contre cette proposition, une campagne assez dure, à la télé, sur Internet. Les Hongrois de l’étranger en voudront toujours au Mszp de les avoir niés en leur refusant la nationalité. »

Quand on lui parle de populisme au sujet de cette loi, Tamás acquiesce :

« Je suis tout à fait conscient que cette décision avait pour but de rassembler des électeurs. Mais cela restera pour nous la plus grande réalisation d’Orbán. Et puis, depuis son élection, il est venu chaque année en Transylvanie, où il a parlé avec beaucoup d’empathie aux Hongrois de l’étranger. C’est important pour nous. »

Il souligne aussi le courage politique du Fidesz qui a osé s’attaquer à la Constitution, qui datait de l’époque communiste. Une décision indispensable que les autres partis n’étaient pas capables de prendre.

« Au sujet des malversations financières, gauche ou droite, c’est bonnet blanc et blanc bonnet »

Pour autant, Tamás n’admire pas béatement le Fidesz et son dirigeant. Quand on lui parle d’une oligarchie de droite en train de se construire, il reconnait aisément que le Fidesz est loin d’être innocent.

« En ce qui concerne les intérêts économiques et la corruption, la droite est tout aussi mauvaise que la gauche. Mais c’est la même chose dans toute l’Europe de l’Est, il n’y a rien à faire. C’est comme une tradition ici, ça ne changera jamais. Quand un homme d’Europe de l’Est à l’occasion de voler, il le fait. »

Malgré ce fatalisme, il n’imagine pas s’expatrier.

« La situation n’est pas bonne, mais elle n’est pas mauvaise non plus. C’est l’image de la Hongrie dans les médias occidentaux qui pose problème. Ce n’est pas aussi terrible que ce que l’on décrit. L’Ouest ne comprend pas les circonstances dans lesquelles nous vivons, notre histoire, et les problématiques qui animent notre petit pays. Il n’y a pas d’exemple comparable en Europe de l’Ouest, aucun petit pays n’a vécu la même chose que la Hongrie. »

Sur les moyens mis en oeuvre par le Fidesz pour redresser l’économie, Tamás continue de penser qu’ils sont toujours meilleurs que ceux de la gauche.

« La différence entre la droite et la gauche, c’est que la gauche est principalement soutenue par des capitaux étrangers, les entreprises occidentales dont ils servent les intérêts. Avec la droite, à malversations égales, l’enrichissement personnel de la classe politique est suivi par l’amélioration du niveau de vie de la société hongroise. »

Quant à l’Europe, pour lui,  elle est la grande gagnante de l’intégration de la Hongrie dans le marché européen.

« Certes, la Hongrie reçoit beaucoup de l’Europe alors qu’elle contribue peu. Mais au final, la Hongrie est forcée d’acheter à l’extérieur et de participer au marché commun. C’est l’Europe qui est gagnante dans cette équation. »

S’il ne pouvait pas voter pour le Fidesz, Tamás opterait pour le LMP.

« Je pense qu’il y a certaines idées du LMP que le Fidesz gagnerait à reprendre. En matière environnementale notamment, la politique de la droite est loin d’être suffisante. »

Quand à la proximité entre le Fidesz et le Jobbik, elle n’a pour notre électeur rien d’évident.

« Les deux partis se détestent, ils n’ont rien en commun. Mais toutes les idées du Jobbik ne sont pas à jeter. Ils sont extrêmes, ils disent beaucoup de bêtises, sont ultra-conservateurs et ultra-nationalistes, mais ils sont aussi très mal connus et souvent jugés sur de faux critères. Dans la presse étrangère notamment, on en dit souvent n’importe quoi. »

Parmi les gros défauts du Fidesz qui le dérangent, Tamás cite en premier la politique de dénigrement de la gauche.

« Le Fidesz a une très large base d’électeurs. Ils n’ont pas besoin d’être méchants avec l’opposition comme ils le font. Leurs critiques sont très dures, elles portent même sur des choses personnelles. C’est nul, le parti n’a pas besoin de ça pour rassembler des électeurs. »

5 Commentaire

  1. Sauf erreur de ma part on ne « nationalise » pas les individus fussent – il  » Sicule »,
    Moi en France , on m’a « naturalisé » , mais je veux bien imaginer que ce « satané régime Orbàn » ne respecte rien … surtout les « Sicules » … mais les « Székely » c’est mieux !

  2. Marion Decome a dit :

    Très juste, nous corrigeons, merci.

  3. Sujet delicat celui des hongrois de l exterieur…dommage que ceux de la metropole, et parmi eux meme bcp qui votent Fidesz, ils soient pas tous sur la meme longeur d`onde que Tamas…La question est toujours la meme « est-il morale d`octroyer la nationalite’ a’ des citoyens qui resident a’ l`etranger et donc exemptes de toute fiscalite’ nationale et leurs accorder aussi le droit de vote ? »

    p.s….ca suffit avec le principe du « aucun petit pays n’a vécu la même chose que la Hongrie. » ca risque vraiment de devenir dangereux et de reveiller chez les voisins une magyarophobie dont les hongrois n`ont pas besoin….

  4. « ca suffit avec le principe du « aucun petit pays n’a vécu la même chose que la Hongrie. » ca risque vraiment de devenir dangereux et de reveiller chez les voisins une magyarophobie dont les hongrois n`ont pas besoin… »

    en meme temps, ne pas le retranscrire les phrases de l’interviewé c’est de la censure ou de la manipulation.

    a nous de relativiser et de ne pas trop en faire, j’ai l’impression par rapport aux annees precedentes que la hongrie commence a accepter la situation et a se tourner vers l’avenir.
    je prends pour exemple tous les jeunes hongrois qui creent des startups plutot que d’attendre apres un job mal payé. la mentalité change et le « n’attends plus sur les autres mais debrouille toi toi meme » commence a faire de plus en plus d’adeptes. et ces exemples sont le debut d’un cercle/d’une boucle positive.

  5. le_butch

    je suis tout à fait d’accord avec vous et je trouve cela extrêmement positif!
    Il y a encore beaucoup de progès à faire en terme de mentalité mais c’est vrai que je suis assez enthousiaste quand je vois de plus en plus de jeunes hongrois se démener comme des forcenés pour avoir une meilleure vie! Espérons que cela continue comme cela!

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