Cet article a été publié le 10 juillet sur le blog Mi ujsag sous le titre « Avec Borsodi, machisme et sexisme (presque) garantis ? ». Son auteur, Joël Le Pavous, l’a gracieusement partagé avec HU-lala.org.
À chaque Coupe du Monde, sa consommation explose. C’est l’un des produits les plus exploités dans la pub’. En Hongrie, elle est le carburant des bons moments (Soproni), le moteur de l’amitié entre mâles (Arany Ászok). Chez Borsodi, la bière colle à l’actu : un truc de mecs qui matent du foot pendant que les nanas taffent. Simone de Beauvoir et Olympe de Gouges s’en retourneraient dans leurs tombes.
Deux nénettes élancées transportent des bennes vers un camion-poubelle. Deux bimbos coupent de la barbaque jusqu’à ce que sueur s’en suive. Quatre pépées taillent du bois dans une menuiserie. Deux canons, juchés sur une nacelle, réparent l’ampoule d’un réverbère tandis qu’un autre surveille d’en bas. Un clip pro-intégration des femmes dans les dits « métiers d’hommes » (éboueur, boucher, électricien, menuisier) ? Faux. Réclame.
Télé-bière-foot
Sous-titres français :
« Les hommes bossent dur toute l’année. Alors, parfois, on les laisse supporter [le foot] en paix. Ils le méritent bien ! Et nous [les gars] méritons de siroter une bière tranquillement et plus facilement. Borsodi avec nouvelle technologie Open Air. Ouvre ! Tourne ! Perce ! ».
Les 99,9 % de non-sémiologues auront saisi le truc : vendre de la bibine. Délicatesse et image de marque ? On repassera. Potentiel polémique ? Maximal.
Réaction numéro 1 face à cette pub : l’anti-masculinisme primaire. Quelle honte de rabaisser, de ridiculiser à ce point la gent féminine et de flatter les douteux instincts de mâles en chaleur avides de houblon ! Pendant qu’on y est, pourquoi ne pas dépoiler ces potiches barbouillées de maquillage et déjà assez (un chouïa) court vêtues comme ça ? Fouler l’égalité des sexes au pied, ça vous excite, bande de phallocrates décérébrés ?
Posture numéro 2 : le pragmatisme. Ces annonceurs ont un talent et un flair à couper le souffle ! Ils exploitent l’imaginaire collectif – monsieur aime le foot et madame s’en fout comme de sa première paire de collants ou de son premier soutien-gorge, par définition – tout en surfant sur le grand raout du moment (le Mondial) pour placer leur marchandise. Quel génie ! Quelle puissance ! Pourquoi diable n’y a-t-on jamais pensé auparavant ?!
Inutile de s’appeler Caroline de Haas (fondatrice d’Osez le féminisme, ndlr) ou Inna Shevchenko (la pasionaria des Femen) pour se fâcher tout rouge. D’abord, on rit du coup de com’ de Borsodi. Puis, après visionnage d’autres clips maison, on découvre que c’est un gimmick bidon. Une sorte de « running gag », comme l’épouse suédoise qui pourrit son cher mari un peu trop porté sur les Krisprolls à son goût. En moins drôle. Vous l’avez ?
Pour nous, les hommes
Et pourtant, ils ont essayé d’être finauds. Promis, juré ! Exemple : leur prod’ précédente, où un beau brun propre sur lui manquait à tous ses devoirs de mec. Ouvrir un bocal récalcitrant pour madame ? Échec. Porter un canapé neuf ? Aïe mes lombaires ! Monter correctement une étagère ? Tout le monde n’est pas Bob le bricoleur. Y’avait de l’idée ! Enfin, jusqu’à ce que monsieur soulage sa frustration entre potes au bar. Carton jaune.
Visiblement, ça n’était qu’un éclair de subtilité. Preuve imparable : la campagne 2013 de Borsodi Super Dry. Le pitch ? Un jeune célibataire en mode « prédateur de soirée » zieute les gazelles au rythme des bouteilles enquillées. La tolérance zéro au volant en Hongrie ? Rien à cirer, il conduira pas ce soir. Mais sera-t-il assez sobre pour en conquérir une ? Suspense, zoom sur décapsuleur et fin. Clairement, ils s’éclatent. Le spectateur, pas sûr.
Les concurrents ne tirent pas autant sur la corde mâle. Encore que. Il y a quelques années, Dreher imaginait une lutte kung-fu façon Bruce Lee pour un demi-litre ou le plan drague foireux d’une serveuse de bistrot car sa cible arbore une alliance. Soproni vante son nectar comme fournisseur d’optimisme. Mais a aussi tenté le mix water-polo, téloche et amitié virile. L’Arany Ászok, elle, soigne les déceptions (flirt avorté, bagnole en rade…).
[...] Pour en savoir plus sur la fameuse Borsodi, visitez le blog Mi Ujsag !
On dirait qu’il y a de plus en plus de pubs qui misent sur le bad buzz machiste en ce moment, encore que je ne suis pas sûre que ce soit le cas ici, qu’ils aient compris que non, vraiment….